Assemblée 2014 – « Aimer et servir selon l’esprit du Christ: l’expérience d’INIGO »

Conférence de Vincent Bocher s.j., directeur d’INIGO, Denis Couillaud, Denis Couillaud, ancien volontaire au Pérou et actuel co-directeur et Eloi Baudoin, ancien volontaire en Grèce

Pour nous parler d’INIGO, service jésuite du volontariat international, le bureau avait invité son directeur général Vincent Bocher sj. ainsi que deux témoins, anciens volontaires internationaux: Denis Couillaud, devenu l’adjoint de Vincent Bocher après une mission au Pérou et Eloi Baudoin, élève ingénieur de l’ICAM, de retour d’une mission de 4 mois en Grèce. En introduction, Jean-Pierre Dubois a évoqué l’importance de la solidarité internationale en région Nord-Pas de Calais où près de 2000 projets ont été recensés, menés par quelque 2000 associations et collectivités territoriales impliquées dans la coopération décentralisée.

Le parcours d’Eloi Baudoin s’inscrit dans le cadre de l’ICAM où tous les étudiants ont à mener en milieu de cursus un projet personnel de quatre mois à l’international qui leur permette de vivre une expérience forte et formatrice et de s’engager dans la vie économique, sociale, politique, caritative ou associative. Réceptif à la pédagogie ignatienne à la base du Mouvement Eucharistique des Jeunes (MEJ) auquel il avait participé, Eloi s’est adressé à INIGO qui lui a trouvé une mission et un accompagnement au sein de la communauté jésuite d’Athènes. Eloi témoigne de l’ouverture au monde et aux autres qu’ont constitué les contacts qu’il a eus en servant, avec Caritas Athènes, des repas aux sans abris et réfugiés de toutes provenance, une expérience qu’il prolonge actuellement en accompagnant des réfugiés en région Nord-Pas de Calais.

Ancien élève de Saint-Jo Reims et éducateur spécialisé, Denis Couillaud a souhaité développer loin de France et dans un contexte culturel différent les capacités humaines inhérentes à sa profession. Imprégné de pédagogie ignatienne, c’est autour de la devise « aimer et servir » qu’il a souhaité développer cette expérience au sein d’une communauté jésuite. De fait, les deux années passées à Tacna au Pérou à animer les activités extrascolaires de jeunes enfants dits « à risques » et à accompagner en dehors du temps scolaire une vingtaine de pensionnaires d’un foyer d’orphelins ont progressivement transformé son regard et son comportement. Il s’est agi non plus seulement de servir mais aussi de servir en aimant l’autre. En ce sens, l’accompagnement de la communauté jésuite et la dimension spirituelle donné à sa mission ont constitué des éléments essentiels de son évolution personnelle.

Ancien médecin généraliste libéral, Vincent Bocher a, après quatre ans de formation au centre de Sèvres et deux ans de noviciat, prononcé en 2007 ses vœux dans la Compagnie de Jésus. Après diverses missions, dont une en qualité de jésuite accompagnateur au centre Saint Marc de Lyon, il a pris en 2014 la succession du Père Olivier de Fontmagne à la tête d’INIGO, le service jésuite du volontariat international.

Vincent Bocher a d’abord exposé les particularités de l’association INIGO, nouveau nom du service créé en 2006 de volontariat international des Jésuites de France et de Belgique, en référence au prénom basque de Saint Ignace de Loyola, à la notion d’embrasement (IGNIS) et au voyage (GO). INIGO offre à des volontaires de 18 à 78 ans la possibilité d’effectuer des missions d’une durée de 4 à 24 mois sous statut de Volontaire de Solidarité Internationale géré par la Délégation Catholique pour la coopération (DCC). Les missions qui peuvent leur être confiées relèvent des domaines de l’enseignement, des services sociaux ou de l’animation pastorale, voire de plusieurs d’entre eux sur un même poste. Avant leur départ, les candidats bénéficient d’une préparation sous forme de rencontres d’échanges, de découvertes et d’approfondissement des thèmes liés au volontariat et à la spiritualité ignatienne. Ils sont ensuite accompagnés par une communauté jésuite dans leur pays d’affectation.

Les motivations des candidats au volontariat international sont les plus diverses: souhait d’une expérience à l’étranger, envie d’exotisme, attachement à une cause humanitaire, voire volonté d’enrichir leur curriculum vitae mais, comme le dit Vincent Bocher: « Un jésuite, ça prend tout! ». Ce qui est important, c’est que la manière dont ils sortent de cette expérience ne soit pas celle de laquelle ils y sont entrés. Arrivés avec l’idée d’apporter leur aide à des populations dans le besoin, les volontaires du service jésuites prennent progressivement conscience qu’en définitive, ils ont autant, sinon plus, à apprendre et à recevoir de l’autre qu’ils ne lui apportent. Comme INIGO le dit souvent à ses partenaires locaux « C’est vous qui formez nos volontaires et non pas seulement nous qui vous envoyons des volontaires pour vous former ». Toutefois, cet échange n’est possible que par la compréhension de la langue, de la culture, du mode de vie (y compris les habitudes alimentaires!) et de pensée de l’autre. Pour le volontaire, en particulier pour un jeune, ceci ne va pas sans difficultés mais c’est la marque que l’expérience spirituelle est en train de se faire lorsque, peu à peu, il les surmonte. Pour ce faire, un accompagnement est indispensable, non pour montrer le chemin mais pour faire réfléchir sur cette expérience « avant, pendant et après » qu’elle soit vécue. En ce sens, l’expérience d’Eloi, toujours impliqué dans l’aide aux réfugiés, est particulièrement probante. Ainsi, avoir été un étranger dans un autre pays aide-t-il à comprendre ce que ressent un étranger, en particulier un réfugié, lorsqu’il débarque chez nous. Si une expérience à l’international peut impliquer une prise de conscience de notre différence, elle renforce en même temps la capacité de comprendre l’autre. La force de la durée, la force d’une immersion dans un endroit, c’est qu’on finit par aimer les gens avec lesquels on vit, aussi différents soient-ils. La preuve en est que, souvent, le volontaire demande à proroger la durée de sa mission.

En dernière partie, Vincent Bocher a évoqué la dimension spirituelle propre au volontariat jésuite international. A la « relecture » d’une mission à l’étranger (mais il peut en aller de même pour beaucoup d’autres évènements, tels notre passage à St-Jo, notre vie professionnelle ou un voyage de découverte) elle revient pour le volontaire à se dire « Est-ce que Dieu n’était pas présent là? » A la réflexion peut-être sera-t-il surpris de voir, des années après, comment Dieu était présent tandis que lui-même avait le sentiment de « sauver le monde », une présence à un moment où « quelque chose l’a fait grandir ». C’est une surprise mais il est vrai qu’il n’y a pas d’expérience de Dieu sans une certaine surprise. C’est sur cette conclusion et le rappel des principales caractéristiques du volontariat jésuite international (« Aimer et servir », connaissance de soi-même et de l’autre, désir de relecture) que s’est achevé l’exposé de Vincent Bocher.

L’occasion a été donnée ensuite aux anciens de poser un certain nombre de questions ou de formuler des observations sur la difficulté, notamment en termes d’emploi, du retour en France, sur l’intérêt d’un tourisme « en profondeur ». Sur ce dernier point en particulier, Vincent Bocher nous informe que les Anciens souhaitant faire l’expérience d’un tourisme en profondeur dans les pays où une communauté jésuite est implantée peuvent demander aux services d’INIGO de les mettre en contact avec ses volontaires.

L’apéritif qui a suivi la conférence a permis aux uns et aux autres de se retrouver dans une ambiance conviviale et de poursuivre cet échange passionnant sur les jeunes et la solidarité internationale.

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